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dimanche, avril 2, 2023

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La bécasse est la plus belle des chasses

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« La bécasse et le chasseur » aurait pu être une fable de La Fontaine tant cet oiseau est réputé pour sa malice. « La bécasse est mystérieuse, c’est pour ça qu’on aime cette chasse », reconnaîssent Philippe et Gilles, fusils cassés sur les épaules, qui sillonnent d’un pas déterminé la forêt sainte-hélénoise et les prairies à la recherche du précieux oiseau. Devant eux, Esma, Didji et Gaïa, leurs fidèles compagnons à quatre pattes, disparaissent et réapparaissent des fougères au bruit des cloches attachées autour de leur cou. Un son qui rappelle celui de la transhumance. « Là, ce sont les anciennes, montre Philippe. On alterne les sorties avec les plus jeunes. Avec elles, ça déménage. »

Ces deux chasseurs de l’ACCA (association communale de chasse agréée) de Sainte-Hélène ne font pratiquement jamais une sortie à la bécasse l’un sans l’autre. « À cette période de l’année, on se voit presque plus qu’avec nos femmes », rigolent-ils. Leur rencontre remonte à 17 ans quand, dans ce même bois, ils se sont rencontrés et ont partagé leur passion commune. « Ça a été le coup de foudre dans la forêt », confie Philippe, qui n’a jamais manqué une saison à la bécasse depuis 25 ans. La seule chasse qu’il pratique depuis qu’il l’a découverte. « Au début, la bécasse est une chasse qui vous attire et après c’est une chasse qui vous passionne », considère-t-il. Même constat pour Gilles, chasseur depuis 40 années, qui s’intéresse à la bécasse depuis 28 ans. « C’est incontestablement la plus belle des chasses », estime celui qui chasse aussi d’autres gibiers. S’ils chassent la bécasse depuis de nombreuses années, ils refusent cependant d’être appelés des bécassiers. Un titre qui ne correspond à rien, selon eux

Certaines parties de chasse, notamment le week-end, les deux hommes sont accompagnés d’Alexis, le fils de Philippe, âgé de 17 ans. « Il a eu son permis l’an dernier, mais il m’accompagne depuis de nombreuses années, précise Philippe. Je crois qu’il est encore plus passionné que moi. Il faut dire que je lui ai appris tout ce que je connaissais. C’est un bon tireur. Il y a trois ans, je lui ai acheté une chienne qui est aujourd’hui prête pour la chasse. »

Des coins à bécasses

Philippe et Gilles chassent la bécasse dès qu’ils le peuvent. Chaque année, entre octobre et décembre, ils posent plusieurs jours de congés pour assouvir leur passion. Et ce n’est pas la météo qui refroidit leurs ardeurs. « Sauf en période de grand froid, sinon ce n’est plus de la chasse car on ne laisse aucune chance à l’oiseau de s’en sortir », précise Gilles, secrétaire de l’association communale de chasse agréée de Sainte-Hélène. Pour eux, pas question « de tuer pour tuer ». Ce jour-là, la chasse se déroule sous des trombes d’eau. Un obstacle pour les chiens, qui ont plus de difficultés à flairer le gibier puisque la pluie masque les odeurs de la bécasse.

La chasse à la bécasse ne se fait jamais par hasard, les deux hommes ont leur coin. « Les bécasses, c’est comme les cèpes, elles viennent toujours au même endroit », assurent-ils. Si la nuit cet oiseau va dans les prairies pour y trouver de la nourriture, il aime bien se cacher dans les bois durant la journée pour être à l’abri des prédateurs.

Une marche de 10 km sans voir un oiseau

Le bruit des clochettes, incessant depuis le début de la partie de chasse, s’interrompt soudainement. À l’entrée d’un bois, Didji est à l’arrêt. Comme c’est la première à avoir flairer le gibier, c’est la patronne de cette traque. Elle est rapidement suivie par les deux autres chiennes. Ensemble, elles délimitent un périmètre. « Il y a de la fiente là et la bécasse a fait la becquée dans le sol, dit Philippe. Ce sont des indices ». Les deux chasseurs arment leur fusil. Ils sont prêts à tirer si l’oiseau s’envole. Mais il s’agira d’une fausse alerte… « La bécasse a dû partir en nous entendant, ajoute-t-il. Ce qui rend cette chasse passionnante, c’est que l’on fait face à un oiseau imprévisible qui fait confiance à son mimétisme. Face à elle, rien est gagné d’avance. » La bécasse est loin de mériter son nom.

Les anecdotes vont bon train au fil de la marche. « L’autre jour, on a trouvé une bécasse dans une prairie alors qu’on était passés au même endroit deux heures plus tôt », raconte Gilles pour justifier la malice de cet oiseau. « Une fois, il y en a une qui s’est envolée dans ma direction, ajoute-t-il. Elle battait des ailes à hauteur de ma tête pour m’intimider. »

Les chiens se mettent une seconde fois à l’arrêt. Cette fois-ci, c’est Gaïa la patronne. L’excitation se lit sur le visage des deux chasseurs, même s’ils reconnaissent ne plus avoir l’adrénaline des premières levées de bécasse. Une nouvelle fois, la bécasse ne montre pas son beau plumage. Résultat de cette matinée : une marche de 10 kilomètres sans voir le moindre oiseau. Mais le plaisir des deux hommes est toujours là : « On est dans la nature, on cherche le gibier, on voit les chiens travailler ».

Trente oiseaux par an

Depuis le début de la saison de chasse (10 septembre), Philippe et Gilles ont prélevé neuf bécasses (en chasse, on ne parle pas de tuer mais de prélèvement, N.D.L.R.). Cela peut sembler peu par rapport au nombre de sorties réalisées, mais les bécasses sont des oiseaux difficiles à chasser. « Il faut attendre l’arrivée du froid pour qu’elles tombent en Médoc, qui est une zone de transit, expliquent-ils. Ici, il y a peu de bécasses en hivernage. D’ailleurs, à partir de janvier, on n’en voit pratiquement plus. » Un raisonnement opposé à celui de la fédération départementale des chasseurs de la Gironde (lire page 5).

Chaque bécasse prélevée est notée dans le carnet de chasse et baguée. « On se limite à quatre bécasses par sortie quand on est deux », dit Philippe. En effet, un prélèvement maximal autorisé (PMA) limite la chasse à la bécasse à trente oiseaux par an et une réglementation départementale autorise cinq oiseaux par semaine.

« Ma passion pour la bécasse est telle que je suis devenu fétichiste », confie Gilles en tenant une veille boite entre ses mains. Elle renferme une multitude de plumes du peintre (petite plume implantée sur le sommet de chaque aile de la bécasse) et de blaireaux (plume du croupion). « Chaque bécasse que j’ai chassée a une histoire », affirme le chasseur sainte-hélénois qui note, depuis des années, toutes ses sorties dans un carnet.

Auteur : Mathieu CAURRAZE

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