Jusqu’ici, rien de véritablement anormal dans la fréquentation du local du Secours populaire à Pauillac. Il n’y a pas d’effet Covid-19 majeur qui aurait précipité dans la précarité de nouvelles familles. Juste la pauvreté habituelle à laquelle nous sommes trop habitués. « Nous, ici, ce sont des travailleurs pauvres qui existent depuis longtemps », note Serge Uria, président du Secours populaire pauillacais. Lequel reste toutefois attentif à certains signaux. Récemment, deux personnes d’Hourtin, « qui ont perdu leur emploi dans la restauration » se sont présentées à Pauillac, en attendant que les Restaurants du Cœur ouvrent dans leur commune. « Depuis une semaine et demie à deux semaines, ajoute Serge Uria, on constate de nouvelles inscriptions de personnes qui nous sont adressées par les assistantes sociales, qui les aident à constituer leurs dossiers de RSA. » En attendant, ces familles monoparentales ou ces femmes seules sont sans ressources. Et même avec le RSA (revenu de solidarité active), commente Serge Uria, ce n’est pas Byzance. La main-d’œuvre non qualifiée qui travaille à la vigne, dans l’attente des travaux d’hiver, fait partie de ceux qui bénéficient de l’aide alimentaire du Secours populaire.
« On est épuisés »
Depuis le mois de mars et le premier confinement, l’activité du Secours populaire de Pauillac est restreinte à la seule distribution d’aide alimentaire pour les soixante-quinze familles bénéficiaires (soit 250 à 300 personnes). « Les familles viennent à des heures bien précises et restent à l’extérieur du local. Elles rentrent juste dans le couloir s’il pleut. » Sinon, c’est la stricte distanciation entre les bénévoles et les bénéficiaires qui prévaut. « On évite les contacts prolongés. » Les colis sont préparés en amont. Les familles ne peuvent plus « choisir » certaines denrées en fonction de leurs besoins du moment.
Pour le reste, « on est épuisés », concède Serge Uria. Les plus âgés des bénévoles doivent se préserver, compte tenu de la pandémie de coronavirus. « Moi-même, je ne devrais pas y aller », avoue le président de 73 ans. « Mais il faut répondre à l’urgence. » Habituellement, une vingtaine de bénévoles se relaient pour la distribution alimentaire. Ils ne sont que six à pouvoir le faire actuellement. Heureusement, comme lors du premier confinement, l’appel à l’aide du Secours populaire a été entendu et une vingtaine de personnes « se sont inscrites comme bénévoles temporaires ». Parmi eux, de jeunes retraités ou quelques actifs entre deux périodes de travail ou dans l’attente d’un emploi fixe. « Pour l’instant, nous sommes assez nombreux », constate Serge Uria. Il faut des bras. Après la matinée consacrée au tri des produits récoltés dans les supermarchés, l’après-midi est consacré à la distribution, de 13 h 30 à 16 h 30.
La Croix-Rouge à l’avant-poste
Du côté de la Croix-Rouge française en Médoc, l’augmentation de la demande d’aide a été flagrante lors du premier confinement. Sur les 237 foyers médocains « accompagnés » du 11 novembre 2019 au 30 octobre 2020, 38 % l’ont été « en période Covid », note Catherine Bahougne, administratrice de l’unité locale Terres du Médoc. Pour ce deuxième confinement, ce n’est pas encore flagrant. Toutefois, « on a eu des situations de familles qui jusque-là n’étaient pas en difficulté », ajoute-t-elle. « Les populations qui nous ont sollicités en période Covid ne correspondent pas tout à fait à celles que nous traitons habituellement », commente Catherine Bahougne. Parmi elles se trouvent « des personnes en perte d’emploi du fait du confinement total et aussi des micro-entrepreneurs, qui se heurtent à des démarches administratives lourdes et sont obligés, malgré eux, de solliciter les associations ; ce qui est nouveau pour eux et très difficile ! » Lorsque « l’activité professionnelle est interrompue », le temps que les aides sociales se mettent en place, des personnes se retrouvent dans cet entre-deux qui peut les conduire à solliciter une aide alimentaire ponctuelle, par exemple. « C’est ce décalage qui met des personnes en difficulté. » Catherine Bahougne évoque l’exemple des « bistrots et des cafés fermés », dont le personnel se retrouve au chômage.
L’administratrice en est certaine : en cette période tendue, un « accompagnement psychologique important » doit être mis en place. « Les personnes qui se retrouvent en situation de demande d’aide sont très vulnérables face à cette nouvelle situation, mais aussi celles qui étaient déjà en difficulté et ne voient pas le bout du tunnel », confirme Catherine Bahougne. Les tournées du camion Croix-Rouge sont suspendues durant ce deuxième confinement. Grâce à ses bénévoles, l’unité locale a mis en place un système de livraison de l’aide alimentaire et/ou de médicaments aux domiciles des bénéficiaires. De leur côté, les bénévoles des Restaurants du Cœur sont en pleine période d’inscriptions des bénéficiaires. La campagne d’hiver commencera le 27 novembre.
Dominique BARRET